La Grenadière
19 juin 2016 § Poster un commentaire
Il faut être sur ses gardes, au festival d’Annecy.
Sa programmation boulimique, ses évènements, ses trouvailles, son grand prix, son ambiance potache et turbulente, cachent aussi des trésors discrets et merveilleux.
Pour moi cette année, ce fut La Grenadière.
Je ne connaissais pas ce film japonais, produit en 2006. Rien d’étonnant, car malgré un prix à Paris en 2008, il est passé chez nous pratiquement inaperçu.
Par chance, les Films du Paradoxe ont eu l’intelligence de l’éditer en dvd. Et Annecy, la bonne idée de le projeter.
Il est réalisé suivant un procédé filmique nouveau : le Ganimé, qui consiste à harmoniser des images fixes (peintures, photographies, images de synthèse), avec une histoire et des sons (voix, bruitages, musique).
Pour adapter cette œuvre de Balzac, Koji Fukada a commandé au peintre Ken Fukazawa 70 toiles, que sa caméra explore et découpe avec délicatesse et ingéniosité, au rythme de la musique mélancolique de Nooki Ueo.
La Grenadière, plus qu’une maison, c’est l’amour maternel. Le paradis lumineux et serein de Louis-Gaston et Marie-Gaston, les fils de lady Brandon – femme mystérieuse, dont le passé est voué au silence, et la vie désormais consacrée au bonheur de ses enfants.
Rires, déjeuners dans le jardin, leçons, jeux, musique, promenades sur le pont de Tours, les jours s’égrènent au rythme des voix off qui conversent et se répondent dans un japonais mélodieux.
Hélas, lady Brandon est rongée par un mal secret. L’ombre envahit le tableau et le cadre se resserre sur la chambre, puis le lit…
Des années plus tard, une corvette s’éloigne dans la brume. À bord, Marie-Gaston désormais adulte ne peut retenir ses larmes au souvenir de la Grenadière.
« Il ne faut pas pleurer, jeune homme ! Il y a un Dieu pour tout le monde, » le console un marin. Mais comment suivre ce conseil, quand les lumières de la salle se rallument, après une expérience cinématographique unique et bouleversante ?
La Grenadière, de Koji Fukada, Japon 2006, 48 mn.
À partir de 7 ans et pour tous.
Ce film est la seule œuvre d’animation de Koji Fukada, dont le film Harmonium a été primé à Cannes cette année (un Certain regard).
Les vacances !
7 août 2015 § 15 Commentaires
Je savais bien qu’elles finiraient par arriver.
Ça fait des mois que j’ai peur !
Les vacances, c’est obligatoire. Mais c’est dangereux…

On risque de rencontrer l’homme idéal – enfin pas moi, je l’ai déjà. (Aha quelle fayotte !)
Bonnes vacances, les coquelicots !
Le chant de la mer
20 avril 2015 § 15 Commentaires
Ah oui ! je fais un métier formidable.
Depuis la semaine dernière, je prépare l’écriture d’un nouveau projet en visionnant des films.
Parmi ceux-ci, une merveille : The song of the sea, de Tomm Moore, à qui nous devons déjà l’excitant Brendan et le secret de Kells.
Comment ai-je pu rater ce film à sa sortie ? Tout simplement en tombant dans une faille spatiotemporelle au cours d’une résidence d’écriture avec congrès de chouettes.
J’ai donc rattrapé mon retard, et suivi les aventures de Saoirse (Maïna dans la version française, on se demande bien pourquoi) et son frère Ben dans une Irlande enchantée.
Saoirse est une Selki qui s’ignore.
Quand son frère le découvre et réalise que, privée de sa pelure d’oignon, elle va dépérir entrainant avec elle la fin du petit peuple, il se lance dans une course contre la montre et affronte ses plus grandes peurs.
Pour les ignares (qui n’ont pas lu comme moi L’île de Nera d’Elizabeth George, hu hu) je précise que les Selki sont des créatures légendaires mi-femmes mi-phoques.
Vêtues de leur poilure blanche (ou noire, ça dépend des goûts), elles se métamorphosent au contact de l’eau.
Sur le très joli site du film, on découvre le tragique point de départ de l’histoire… (Mais que fait Brigitte Bardot ? Vous le saurez en accompagnant Ben !)
Pour vous faire envie, la bande annonce en anglais (bicoz la française est cucul) :
Sur ce, je vous laisse, je dois réviser Le monde de Nemo. L’Ado n°1 a sauté de joie en entendant ça. Crotte ! Il va encore squatter mon canapé en dévorant tout mon pop corn.
Le chant de la mer, de l’enthousiasmant Tomm Moore, 2014.
À partir de 6 ans, l’âge des manteaux de fourrure. (Je blague.)
Chat cache-cache chez Bonnard
24 mars 2015 § 11 Commentaires
Je ne vous ai pas dit ? J’ai vu l’expo Bonnard. Miaou !
J’ai emmené l’Ado n°1, qui a trouvé ça waow. Sauf qu’il y avait trop de lumière pour ses mirettes. « Comme il fait déjà jour, » a-t-il constaté en clignant des yeux devant les tableaux.
Faut avouer que je l’ai tiré du lit avant l’heure réglementaire du lever à Adoland (13H), tout ça pour le traîner au musée d’Orsay. C’était chaud.
Figurez-vous que Bonnard avait prévu le coup : il a mis des chats partout. Des chats, des chiens, et même un perroquet ! (Il y avait aussi un monsieur en costume qui faisait les gros yeux à chaque fois que je gloussais.)
Nous avons donc brillamment surmonté l’épreuve de la visite avec ado en organisant une partie de chat-cache-cache endiablée. Le monsieur en costume a suivi l’opération d’un air furibond.
Évidemment j’ai vite gagné. Youplaboum. Comment ça, un perroquet ça compte pas pour dix chats ? Je fais ce que je veux, c’est moi qui ai inventé ce jeu je vous ferai dire.
Ça c’est gâté quand j’ai reconnu Fantômette, le chaton de ma copine Anne et que j’ai bondi de visiteur en visiteur pour propager cette fantastique nouvelle ! Lorsque j’ai atterri dans les bras du monsieur, il m’a flanquée à la porte. C’était le directeur de la sécurité.
L’ado a dit à son père qu’il n’irait plus jamais nulle part avec moi. M’en fous, j’ai gagné.
Pierre Bonnard. Peindre l’Arcadie. Foncez, c’est merveilleux.
Où ? Au musée d’Orsay.
Quand ? Jusqu’au 19 juillet 2015
Avec aussi le parcours-jeux organisé pour les enfants : Le paradis, c’est ici.
Pour les ados : Jours heureux. Et en famille : Voir la vie en couleurs.
Ciné gourmand, on demande un enfant
16 mars 2015 § 8 Commentaires
Ça m’énerve.
La pâtisserie des Rêves organise des ciné gourmands pour les enfants, mes bichons.
Une fois par mois, projection de film et à la sortie, ateliers gourmand, goûter miam, ballons roses, youplaboum quoi. Tout ça dans le jardin de la Pagode.
Parce que ah oui, la projo en plus c’est à la Pagode.
Sauf que moi j’ai plus d’enfant sous la main. L’ado n°1 a refusé d’enfiler une maxi turbulette. Quant à l’ado n°2, je ne lui ai rien demandé, c’est trop compliqué d’attirer son attention depuis qu’il a un casque audio greffé sur les noneilles.
Bref, on demande un bout de chou !
De préférence un qui ne mange que de la choucroute et du fromage de tête, et qui soit bien partageur en terme de goûter.
Ou sensible à l’hypnose.
C’est où ? Au cinéma la Pagode, 57 rue de Babylone, Paris 7ème.
C’est quand ? Une fois par mois, prochaine édition le 22 mars à 10h30 avec en avant première Clochette et la créature légendaire. Résa ici.
NB : Je ne suis pas peu fière d’avoir enfin utilisé l’expression en terme de que je trouve super poilante. (Pas vous ?)
Chouette, Macbeth
16 mai 2014 § Poster un commentaire
Le théâtre du Soleil est né il y a 50 ans, Shakespeare 400 ans plus tôt, je vous laisse calculer. Ça fait deux beaux anniversaires qu’Ariane Mnouchkine célèbre avec sa version de Macbeth aka « la pièce écossaise. »
Mon ado number 2 dont la culture est tout à fait hirsute m’a expliqué que les comédiens ne prononcent jamais le titre de cette pièce, ça porte malheur. Ils ne disent pas : « Je joue dans Macbeth », mais « Je joue la pièce écossaise. » Heureusement ça ne vaut pas quand ils sont sur scène parce que ça ferait bizarre si, dans les dialogues, ils remplaçaient « Macbeth » qui est le nom du héros par « la pièce écossaise. » Déjà ça ne voudrait plus rien dire (« Digne pièce écossaise, nous attendons votre bon plaisir ! ») et le spectacle durerait une demi heure de plus, or il est déjà long.
Je ne me plains pas, c’est un enchantement. Mais aux dires de l’Auteur, quand on mesure 1m90, le temps passe plus lentement dès qu’on s’assoit sur les bancs de la Cartoucherie, un peu comme pour les chiens, il faut multiplier par 7.
On ne va pas contrarier l’Auteur, mais cette théorie est déjà très bizarre pour les chiens. Ceci étant, on n’est pas trop trop bien installé à La Cartoucherie. Il parait que c’est fait exprès. Comme à l’église. Risque d’assoupissement, néant.
Que dire de cette ébouriffante mise en scène sinon : emmenez vos ados ?! C’est the pièce pour eux. Jugez plutôt :
Primo ils ne mesurent pas encore 1m90.
Deuxio ils suivront facilement vu qu’ils connaissent l’histoire (cf Simpson, saison 20 épisode 20).
Troisiémo à l’entracte on mange super bien.
Je gage que ces arguments suffiront à convaincre les adolescents les plus molassons. Inutile d’évoquer la mise en scène héroïque et généreuse d’Ariane Mnouchkine, la musique qui anime ce monde poétique – lande tourmentée, château envoûté, forêt en marche –, le souffle de cette tragédie noire et lumineuse, la farouche énergie du chaos qui s’empare du plateau…
La sauvagerie de ce destin ensorcelé rétame Game Of Thrones, et dans les grandes largeurs.
La seule chose qui me chiffonne dans cette mise en scène, c’est que Lady Macbeth est nulle en chouette. Quand elle en entend une, elle croit que c’est un hibou. Non mais hou !
Macbeth, de William Shakespeare (nouvelle traduction d’Ariane Mnouchkine), au théâtre du Soleil, Cartoucherie de Vincennes – Paris 12e.
À partir de quand ils regardent Game of Thrones.
Mousquetaires !
9 mai 2014 § Poster un commentaire
Mordiou ! Le musée de l’Armée a présente une expo consacrée aux Mousquetaires, les plumeaux.
On y trouve des mousquets, des épées, des masques de fer, de vieilles pipes, des jeux de dé, l’armure de Louis XIII, celle de Richelieu, la panoplie de Gene Kelly en d’Artagnan… Et d’autres témoignages tout à fait ébouriffants sur ces gardes du roi, leur vraie vie et celle que leur inventa leur romanesque historiographe, Dumas père.
Il se trouve que je connais fort bien le sujet, ayant moi-même été mousquetaire.
Pas dans une vie antérieure, non, dans celle-ci.
J’ai embrassé cette carrière avec ferveur à l’âge de 4 ans – je m’en souviens comme si c’était hier – le jour où, profitant d’une absence de mon frère, je pus fouiner dans son coffre à jouets et faire main basse sur la rutilante panoplie de mousquetaire qu’il avait reçue à Noël. L’uniforme exerçait sur moi une méga fascination… Bien plus que le costume de princesse qu’on m’avait refilé et dont le diadème n’avait pas résisté à l’examen approfondi qu’un mien cousin lui avait fait subir, afin de déterminer par le feu si ses diamants étaient authentiques.
Quoique dépourvu de (faux) diamants, le costume de mousquetaire était wahou en diable.
Jugez plutôt : une large casaque bleue à manches ouvertes, marquée d’une croix blanche fleurdelysée, un gros baudrier en plastique avec une boucle dorée où accrocher l’épée (hélas, le mousquet n’était pas fourni, mais je n’étais pas assez versée dans la science étymologique pour m’en apercevoir)…
Et surtout, surtout, un grand feutre brun orné de la plus belle, la plus blanche et la plus ébouriffée des plumes. Au moindre souffle d’air, elle prenait vie.
J’aurais passé des heures à m’admirer en train de l’agiter tandis que je saluais mon reflet dans un miroir. Cette plume valait à elle seule qu’on périsse écrabousillé à Belle-Ile, dans l’éboulement tragique de la grotte de Locmaria.
Toutefois, j’avais autre chose à faire que des moulinets devant mon reflet, d’autant que le miroir en pied se trouvait dans la salle de bain de la Police des Princesses, laquelle n’était guère tolérante concernant mes emprunts à la garde robe de mon frère (son fils, pour ceux qui ne connaissent pas le contexte).
Je filai donc dans le jardin où, toute la journée, je m’exerçai à mon nouvel état. Je ferraillai hardiment contre la vigne vierge, poursuivis avec ardeur un corbeau, une armée de moineaux, et m’écorchai largement les genoux à cause de cette épée qui m’arrivait sous l’aisselle et dans laquelle je me prenais les pieds.
Ce fut si exaltant que même les (sévères) représailles de la Police des Princesse et la confiscation de mon équipement, plume comprise, pour restitution à son légitime propriétaire n’y firent rien.
Ayant goûté l’odeur de la poudre et l’ivresse de l’aventure, j’étais perdue à la cause des diadèmes. Comme l’a si bien dit Dumas père : mousquetaire un jour, mousquetaire toujours !
Ce fut le début d’une grande aventure qui, parfois, dure encore. Bientôt je sus lire, je découvris les tribulations de mes frères d’armes. Par chance, je m’aperçus à cette occasion que la littérature offre des costumes plus éclatants – quoique plus discrets – que le coffre à jouets de mon frère. Et inusables, ceux-là.
Mousquetaires ! au Musée de l’Armée à Paris, jusqu’au 14 juillet. Une exposition recommandée dès l’enrôlement, soit à partir de 4 ans. Pour préparer la visite, par ici le site.
À lire dès 8 ans : Les trois mousquetaires, Alexandre Dumas (texte) et Christel Espié (ill), Sarbacane, 2013 – un livre aux illustrations pleines de panache… mais hélas une version abrégée du texte.
Les ébouriffantes photos souvenirs de ma carrières sont extraites du film de George Sydney, Les trois mousquetaires, 1948.